La médiation est un processus auquel de plus en plus d’institutions ont recours, notamment dans l’Éducation nationale, la justice, les affaires familiales, etc. Elle s’appuie sur l’expérience de l’autre en tant que personne « ayant le même vécu » et permet ainsi une plus grande proximité et, par conséquent, une plus grande confiance.Une expérience de la médiation par les pairs en psychiatrie a été menée en France depuis 2014, importée notamment du Québec, dans laquelle d’anciens malades guéris deviennent à leur tour « soignants ». Si, sur le papier, cette expérience était séduisante et prometteuse, sa mise en place n’est pas allée de soi, et de nombreuses controverses ont émergé. Elles sont venues de différents acteurs du secteur de la psychiatrie. Opposition des usagers Dans un premier temps, les usagers de la psychiatrie (associations de patients, de familles, etc.) ont accueilli positivement ce nouveau dispositif mais les critiques n’ont pas tardé et les associations se sont un temps désolidarisées de l’expérimentation. Leurs craintes étaient que les médiateurs ne soient pas bien intégrés, que le rythme de travail d’un secteur de psychiatrie soit trop intense pour ces anciens malades peut-être encore fragilisés. Mais leur revendication première était que, contrairement au Québec, où les médiateurs viennent de milieux associatifs, les médiateurs de santé-pairs français (aussi appelés « pairs-aidants ») passent un diplôme délivré par une université en alternance avec un stage « pratique » en hôpital. Le milieu associatif était donc, en quelque sorte, exclu de l’expérience. Opposition du personnel soignant/infi rmier La protestation est aussi venue du personnel soignant, et notamment des infi rmiers, pour qui les médiateurs « déqualifi aient », en ayant un diplôme différent, le travail. L’argument économique a également été avancé, les infi rmiers mettant en avant que lors de revendications, on leur opposait inlassablement un manque de moyens alors que des moyens ont dû être débloqués pour fi nancer cette expérience. Cela a redoublé un sentiment de non-reconnaissance. Ils craignaient enfin que ces « anciens » patients ne soient pas tout à fait rétablis et qu’ils rechutent, ce qui aurait entraîné un travail supplémentaire : en plus de soigner les malades, il aurait aussi fallu prendre en charge les médiateurs. Opposition de certains médecins psychiatres Enfin, la dernière controverse est venue de certains psychiatres opposés à cette nouvelle organisation, qui, selon eux, dévalorisait la psychiatrie, en utilisant d’anciens patients là où les soignants avaient échoué. Il s’agissait pour eux d’une remise en cause de tout le secteur. Cette valorisation d’une « vulgaire » expérience par opposition au savoir scientifi que a suscité la colère de certains médecins qui n’ont pas hésité à faire part de leur mécontentement, parfois publiquement. Ils mettaient aussi en avant qu’un médiateur ayant une expérience propre de bipolarité ne pourrait pas nécessairement être légitime avec un patient schizophrène par exemple et qu’une maladie ne pouvait en aucun cas se « transformer » en profession.Une expérience houleuse et un bilan positif Ces nombreuses oppositions ont compliqué la mise en application de cette nouvelle approche du soin mais ne l’ont pour autant pas stoppée.